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5 avril 2011 2 05 /04 /avril /2011 19:44

suite de l'article précédent ...

 

Les religions verticales :
 

Pour les religions « morales » qui affirment une existence après la mort où nous serions récompensés ou au contraire punis de nos actes, la vraie vie, les vraies réalités, ne sont pas de ce monde. Un peu comme pour le platonicisme où les ombres qui s’agitent au fond d’une grotte ne reflètent qu’imparfaitement le monde extérieur, nos joies et nos bonheurs ne sont qu’un prélude à la plénitude qui attend notre âme dans l’au-delà. Cette âme est accompagnée de nos corps dans l’espérance juive eschatologique du premier siècle avant Jésus-Christ, qui sera reprise par la résurrection chrétienne : ce sont des corps glorieux, ressuscités, que nous voyons sur les icônes orthodoxes, déjà en contemplation de Dieu. Des communautés monachiques se développent comme des pierres d’attente pour l’avènement du Royaume de Dieu. La sérénité humaine du croyant introduit aux béatitudes célestes. La mort violente du martyre raccourcit notre exil sur terre et nous rend plus vite aux félicités du paradis.


Dès lors, notre vie sur terre s’avère être un véritable parcours du combattant et c’est sa finalité qui est importante : l’accès à l’éternité. Pour cela, le christianisme propose le baptême. Une fois entré au sein de l’Eglise, le fidèle, en obéissant à l’Eglise, est assuré d’arriver à terme. Mais hors de l’Eglise point de salut ! C'est pourquoi les théologiens du Moyen âge qui - dans cette logique - inventèrent les limbes avaient raison et les parents, qui négligeaient l’ondoiement en cas d’urgence et le baptême dans les meilleurs délais, étaient bel et bien des imprudents. Au baptême chrétien, rite d’entrée dans la communauté religieuse, correspond la présentation de l’enfant au temple chez les juifs et la conversion dans l’islam.


Toutefois, à cette vision positive et confiante dans l’encadrement religieux qui porte le croyant coutumier, lequel accomplit, sans état d’âme, les rites et autres obligations qui lui sont prescrites, s’oppose des visions pessimistes.


Le dualisme, même modéré, a introduit l’omniprésence du Mal en la personne de Satan et d’une armée de démons, lesquels rodent sans cesse pour nous tenter et nous faire succomber. Le parcours du combattant est semé d’embûches. Les séances d’ascétisme sont nécessaires pour fortifier la chair, ou encore pour accompagner la pénitence et le repentir : le jeûne, les veillées d'étude prolongées, les récitations de prières et de mantra, le lever matinal dans la froidure, les habits rugueux, la flagellation du corps, etc.


L’homme est pêcheur, incapable de se relever de lui-même de la Chute, de retrouver seul le chemin du Paradis perdu, entravé d’un péché originel qui se transmet de génération en génération. Il ne peut se lever et marcher que s’il « renaît d’en haut ». C’est ce que Jésus dira au pharisien Nicodème qui lui rend visite de nuit (Jean seul, 3, 1-21) : « Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l’Esprit est esprit. Ne t’étonne pas, si je t’ai dit : Il vous faut naître d’en haut » (6-7). Les Eglises pentecôtistes et évangéliques qui prônent ce « new born again » se sont engouffrées dans cette logique.


Dès lors, le baptême de l’eau hérité de Jean Baptiste doit être complété par le baptême de l’esprit, ce qu’annonceront précisément les amis de Paul à Apollos qui avait baptisé les premiers chrétiens Ephésiens selon le rituel baptiste de Jean (Actes, 18, 24-28, et 9, 1-6). Ce baptême complémentaire se donne par imposition des mains : « et quand Paul leur [les douze johanniques d’Ephèse] eut imposé les mains, l’Esprit saint vint sur eux, et ils se mirent à parler en langues et à prophétiser » (19, 6). Ce sont les apôtres, puis les évêques selon la filiation apostolique, qui sont habilités à imposer les mains. Cela correspond, chez les catholiques, à la confirmation des baptisés et, par ailleurs, à l’ordination des prêtres. Contrairement au baptême qui part de la volonté d’une personne (ou par parents interposés pour le pédo-baptême), l’imposition des mains est un acte d’autorité de la part de l'autorité ecclésiale.


Pour les cathares, ce rituel était précisément celui du "consolament" (le seul sacrement cathare), lequel était donné par les "bonshommes" (à défaut des évêques qui ne purent exercer leur ministère à cause de la répression) et le plus tard possible afin d’éviter les rechutes éventuelles ! Ce qui, paradoxalement, équivalait somme toute au sacrement catholique de l’extrême onction.


Cette vision pessimiste d’un homme qu’il faut non seulement encadré mais aider « d’en haut » va se trouver fortement renforcée lors des réformes protestantes par le contre sens que Martin Luther effectue en lisant les épîtres de Paul et en proclamant « sola Gracia ». Alors que chez Paul, la grâce de Dieu accompagne tout croyant qui s’engage dans la nouvelle voie, celle ouverte par le Christ, et va de pair avec la charité, Martin Luther croit y voir un privilège que Dieu accorderait au compte goutte et selon un arbitraire total ! Jean Calvin, reprenant saint Augustin, en fera une prédestination. Dès lors, le salut n’a plus rien à voir avec un mérite, le bilan d’une vie, un karma pour reprendre une expression hindouiste, un solde moral, un repentir fut-il tardif, un dernier sursaut de la foi, une ultime conversion, mais il dépend exclusivement d’un libre arbitre divin sans aucun justificatif. C’est précisément le Dieu tyran contre lequel combattit Job au nom de la justice.
 

à suivre ...

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