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Une religion à initiation
Même si le christianisme se présente comme une religion ouverte, elle n’est pas une auberge espagnole. Le néophyte doit suivre un enseignement, le catéchuménat, puis se faire baptiser ; on lui rappelle que la grâce de Dieu est nécessaire ; que l’Esprit vient d’en haut ; etc. Le christianisme gnostique, qui se développe à la fin du Ier et au IIème siècle, insiste sur le cheminement initiatique par la Connaissance pour élever l’âme.
Le culte de Dionysos a été l’un des premiers cultes à mystère de l’Antiquité, après celui de Déméter, la déesse des récoltes, de l’agriculture et des moissons – dont les rites agraires étaient de toute première importance.
« Antérieur à l'orphisme, le culte associé à Dionysos contient des rites orgiaques qui impliquent que l'initié s'abandonne à sa nature animale pour en éprouver le pouvoir fécondant et la plénitude. Le vin était le moyen d'abaissement de conscience nécessaire à la révélation de secrets de la nature dont l'essence était symboliquement représentée par un accomplissement érotique et sacré : l'union de Dionysos et d'Ariane, sa compagne. Le second degré de l'ivresse, nous avons l'extase ressentie aux sons mélodieux de sa lyre. Associé à l'orphisme *, on retrouve dans cette religion des caractéristiques qui préfigurent le christianisme : mi-homme mi-dieu, Dionysos était aussi ce héros qui souffre, qui meurt et qui ressuscite. » (S Acharya, Les Mythes fondateurs du christianisme, lien).
* L’orphisme est un courant religieux de la Grèce antique, qui se rattache à Orphée, le maître des incantations, poète musicien de la mythologie grecque. Il a donné une abondante littérature entre le VIème siècle av. J.-C. et la fin du paganisme. Christian Godin le caractérise par la croyance en la divinité de l’âme, la transmigration, l’impureté du corps et le caractère libérateur de la mort : idées qui seront reprises par Platon (428-347 av. J.-C.) (Dictionnaire de philosophie, Fayard / éditions du Temps, 2004 : 919).
Le chevreau et l’agneau
Lors de son séjour en Thrace, pour le soustraire à la vengeance d'Héra, les nymphes a qui il a été confié, le transforment en gentil chevreau. Ceci fait penser à l’agneau de Dieu des textes johanniques, à commencer par Jean Baptiste qui le désigne ainsi à ses disciples (seul Jean l’évangéliste raconte la scène : Jn 1, 29 et 35-36). La comparaison est d’autant plus possible que, dans l’iconographie chrétienne, l’agneau de l’Apocalypse est représenté portant triomphalement un étendard ou une flamme au tissu ondulant … ce qui n’est pas sans faire penser à la thyrse (en latin thyrsus, du grec ancien θύρσος / thýrsos) que Dionysos porte à la main, qu'on trouve à ses pieds ou dans son cortège ; c’est l’attribut majeur par lequel on le reconnaît. Il s’agit d’un grand bâton jouant le rôle d’un sceptre. Probablement en bois de cornouiller (un arbre commun de nos haies et de nos bois dont le fruit donne un des fruits rouges et aigrelets, les cornouilles), il est orné de feuilles de lierre (ou de la vigne) et surmonté d'une pomme de pin (ou d’une grenade).
l'agneau de Dieu gardant les 7 sceaux de l'Apocalypse / le pied sur le Livre / dans la Jérusalem céleste / et en dessin sur un manuscrit.
Dionysos et Jésus, avec leurs emblèmes, entraînent derrière eux la foule de leurs disciples.
L’entrée triomphale dans la cité.
Lié au culte de Déméter, la déesse de l’agriculture, les mystère d’Eleusis, cité au nord-ouest d’Athènes, incluaient Dionysos sous la figure de Iacchos *. Voici une description des Grands mystères (les Petits mystères étaient célébrés au printemps et on sacrifiait un cochon à la déesse !)
« Les Grands mystères duraient neuf jours, d’après la durée de l’errance de Déméter à la recherche de sa fille. En septembre, avant l’automne, on se préparait aux cérémonies préliminaires qui se déroulaient à l’extérieur et qui sont donc mieux documentées. La première partie du rituel débutait par une procession durant laquelle on transportait des reliques sacrées (les hiéra) jusqu’à Athènes pour les placer dans l’Éleusinion, un sanctuaire à la base de l’Acropole. Les mystes (candidats dignes des mystères) se plongeaient dans la mer pour se purifier. Une période de jeûne s’écoulait avant que la procession de mystes suivent la statue d'Iacchos, les hiéra et les prêtres en direction d’Éleusis le long de la route sacrée. » (Wikipedia, Mystères d’Eleusis)
* Iacchos (en grec ancien Ἴακχος / Iakkhos) est une figure incertaine de la mythologie et de la religion grecque antique : son nom pourrait n'être qu'une épithète de Dionysos, mais pourrait aussi désigner un avatar orphique du dieu. Selon la tradition, il est le porteur de torche qui guide les cortèges d'initiés aux mystères d'Éleusis. Dans les Bacchantes, Euripide rapporte que les ménades poussaient un cri à l'unisson pour appeler Dionysos : « Iacchos ! Bromios ! » (Bromios = « au bruyant cortège ») (Wikipedia, Iacchos).
Procession des mystères d’Eulésis, plaque votive, milieu du IVe siècle av. J.-C.
Iacchos (avatar de Dionysos) figure en bas, portant deux torches, l'une levée, l'autre baissée,
et se présente en tête du cortège devant la déesse Déméter.
Jésus, lui aussi, fit une entrée triomphale à Jérusalem, juché sur un ânon conformément à la prophétie de Zacharie (Mt 21, 1-9 ; Mc 11, 1-10, Lc 19, 28-40 ; Jn 12, 12-19). Cortège, lui aussi bruyant, si bien que des pharisiens amis de Jésus lui conseillent de tempérer la fougue de ses supporters : « Maître, réprimande tes disciples » (Luc seul 19, 39-40).
à suivre ...