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3 septembre 2009 4 03 /09 /septembre /2009 09:45

par Jean-Claude Barbier (à la suite de l'article "L'éveil aux Ecritures sur le chemin d'Emmaüs" et des précédents). L'article présent a été publié le mercredi 8 avril 2009 dans les Actualités unitariennes et transféré ici.

C’est Paul qui le dit : ma foi est vaine si Christ n’est pas ressuscité !

Or, la Pâque chrétienne est rétroactive. Il y a eu relecture des évènements à partir de l'effervescence de la Pentecôte. Sur le coup, le dimanche matin, les femmes puis les disciples qu’elles alertent découvrent seulement un tombeau vide. L’étonnement et le désarroi sont grands car personne n’a assisté à la résurrection elle-même de Jésus, à sa sortie du tombeau ... ni d’ailleurs d’aucun autre humain !
*seul l’évangile tardif de Jean nous parle, comme pour mieux préparer les esprits, de la célèbre "résurrection de Lazare " Jn 11, 1-46 ; encore n’est-il pas précisé que Lazare ne mourra pas une seconde fois ... Alors que pour Jésus, ce serait du définitif, à savoir une victoire sur la mort.

Marie-Madeleine annonçant le tombeau vide / la Résurrection aux disciples, psautier de Saint-Alban, 1120s.

Le lien entre ce constat, inexplicable pour eux, et les textes du Serviteur souffrant (contenus dans le Livre d’Isaïe) ne s’imposera qu’après, suite à une maturation à la fois dans le fort intérieur de chacun et à la fois dans une exaltation communautaire d’abord en Galilée et qui culminera le jour de la Pentecôte à Jérusalem. C’est donc à la Pentecôte que jaillit le premier kérygme chrétien : Jésus est ressuscité d’entre les morts, il est donc le Rédempteur tant attendu (= notre Sauveur), notre Messie (= le christ par excellence ; d’où son appellation post-mortem "Jésus-Christ"). 

Ceci dit, nous n’avons plus aujourd’hui les mêmes références car, si nous pouvons apprécier la ferveur d’une espérance messianique, nombre de chrétiens ou croyants n’adhèrent plus à une Histoire sainte qui serait guidée par Dieu. La référence aux textes du Livre d’Isaïe ne sauraient, de nos jours, constituer une preuve. Au contraire, les historiens sont tout à fait en droit d’accuser les premiers chrétiens d’avoir rédigé les textes du Nouveau Testament pour faire croire à une actualisation des prophéties ... ce que ces rédacteurs n’ont d’ailleurs pas manqué de faire !

Restons en donc aux faits bruts comme nous l’avons déjà dit dans les textes de cette série, à savoir le constat du tombeau vide. Sans doute la famille est-elle venue récupérer le corps avant l’aube puisque le sabbat était terminé à la tombée de la nuit, le samedi soir, et nous sommes déjà au dimanche matin. De là la surprise tout à fait sincère des disciples qui leur donnera la force du témoignage (ce sont des hommes effectivement de foi et de conviction et non de vulgaires menteurs ou imposteurs !), et puis aussi l’apparition de la famille de Jésus à partir de la Pentecôte : Marie est là, avec les frères de Jésus à commencer par Jacques qui, plus tard, s’imposera à Jérusalem. Or cette famille avait été absente tout au long du ministère de Jésus ainsi que nous l’expliquerons dans un article ultérieur que nous consacrerons au mythe de la Sainte Famille).

Rappelons que l’inhumation dans le caveau de Joseph d’Arimathie n’était que provisoire. Elle fut improvisée (Jésus était bien portant et nul ne pouvait prévoir un dénouement aussi rapide et tragique) et elle fut hâtive puisque survenant à la veille d’un sabbat, un vendredi soir. Jésus fut-il inhumé à Talpiot, à une douzaine de kilomètres au sud est de Jérusalem ? ou ailleurs ?

Entre Pâques et la Pentecôte, les convictions individuelles se rencontrent – il est dit que Jésus apparut à plusieurs disciples à la fois, que ce soit à Jérusalem, puis en Galilée (sur une montagne, ou encore au bord du lac de Tibériade) où les disciples de cette région repartirent. A terme, les convictions – qui sont convergentes – sont communiquées, partagées ; elles deviennent communautaires. Lors de la fête de la Pentecôte, les disciples se réunissent à nouveau – et cette fois-ci avec la famille de Jésus *. C’est l’allégresse dans la certitude : Jésus est ressuscité conformément aux Ecritures du Serviteur souffrant. Le récit des pèlerins d’Emmaüs, lu dans Luc seul (24, 13-35) résume magnifiquement cette élaboration progressive du premier acte de foi des chrétiens, le premier Kérygme.

* La famille de Jésus gardera secret le lieu de l’inhumation, affaire privée d’une famille.

Alors, aujourd’hui où les mentalités sont de plus en plus imprégnées par les progrès scientifiques, pouvons nous encore proclamer un tel kérygme à l’encontre de toutes les lois naturelles que nous connaissons ? Peut-on en rester à cette pure croyance ? devons nous essayé de contourner le fait historique en disant qu’il faut lire les textes d’une façon toute spirituelle ? N’est-il pas temps de refonder la foi sur d’autres bases (par exemple l’enseignement de Jésus, ses faits et ses gestes) ?

Certes le kérygme de la Pentecôte est un bel élan, porteur d’une folle espérance de survie, de fusion éternelle avec les êtres que nous aimons (Jésus, Marie et tous les ressuscités à leur suite !), d’union mystique avec Dieu, etc., mais il isole aussi la foi chrétienne dans une croyance irrationnelle, tout à fait éloignée de notre expérience humaine et de nos connaissances. Comme disait Paul : folie pour les hommes ! Faut-il donc continuer à être fou pour être chrétien, au nom d’un enchantement du monde, d’une forte espérance qui console, mais alors d’un opium dirait Karl Marx ? Où bien, ne vaudrait-il pas mieux que la foi rime enfin avec la lucidité et le réalisme ?

Nombre de chrétiens unitariens, à commencer par notre Eglise historique en Transylvanie, ne fêtent pas la Pâque. Leur foi repose sur leur attachement à Jésus et la croyance en l’existence de Dieu, mais non sur cette histoire de résurrection qu’ils relèguent au rang des saintes légendes. Tant pis pour eux, car après la Noël (qu’ils ne fêtent pas non plus car ils n'adhèrent pas au dogme de l'Incarnation), c’est une nouvelle fête qui leur passe sous le nez !

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